Mercedes-Benz veut devenir le leader de la voiture autonome
Comme d'autres constructeurs, Mercedes-Benz ne semble pas résolu à laisser le futur marché de la voiture autonome à ses concurrents outre-atlantique.
Lors d'une récente présentation au centre de recherche et développement de Mercedes-Benz à Sunnyvale, en Californie, le constructeur automobile allemand a fait quelque chose de paradoxal: il a évoqué le passé :
La société a commencé avec l'histoire de ses fondateurs. Véritables pionniers et perturbateurs avant leur temps, ils ont amorcé le virage de la révolution industrielle et participé à la naissance de l'industrie automobile telle qu'on la connait maintenant. L'entreprise continua avec cet état d'esprit entreprenant et fut le premier grand constructeur automobile à mettre en place un centre de recherche en Californie, en 1995.
«Imaginez, il y a tout juste 20 ans», a déclaré Arwed Niestroj, PDG du centre. "Google n'existait même pas." On appréciera la pique au rival.
Mais le problème est bien là. Les géants américains (Google, Apple, Uber, Tesla) affichent leurs ambitions sans aucun complexe, et n'hésitent pas à bousculer les entreprises européennes présentes dans le domaine de l'automobile depuis plus d'un siècle. Malgré la bonne reprise des ventes dans le secteur, les constructeurs automobiles vont devoir bientôt affronter un avenir où beaucoup de voitures se conduisent elles-mêmes, où moins de gens les achètent et où - le plus terrifiant - les véhicules ne soient plus aussi essentielles. En matière de technologie, l'avenir du transport en commun réside dans les services, en particulier dans les villes: allumez votre smartphone, lancez votre application et votre voiture autonome passe vous chercher. À ce stade là, la marque du véhicule importe peu voire pas, à la manière d'un taxi.
La stratégie de Mercedes pour ne pas être pris de court est d'attaquer le marché par tous les angles. La marque peut encore s'appuyer sur son image et ses modèles haut de gamme.. Le constructeur automobile, détenu par Daimler AG, déploie actuellement des fonctionnalités semi-autonomes dans ses voitures de luxe et travaille sur des véhicules entièrement autonomes, à l'instar de ses derniers prototypes : la F015 et plus récemment, le Vision Tokyo. Le constructeur a également fait l'acquisition, avec Audi et BMW, du système de cartographie de Nokia, Here. Le groupe Daimler se positionne sur les services : car2go, présent dans 31 villes à travers le monde, propose une flotte d'automobiles en libre service. Le groupe expérimente également un service de VTC spécial, dédié aux enfants.
"Nous croyons qu'au 21ème siècle, les voitures devront être très différentes. Nous devrons utiliser de nouveaux termes pour les définir", dit Niestroj. "La voiture va devenir un véritable espace de vie mobile."
Des investissements sur le terrain de Google?
Fidèle à cette pensée, le fabricant de voitures fait des approches dans différents domaines, et tente d'imaginer comment le matériel, les logiciels et le multimédia fonctionneront à l'intérieur de la voiture autonome de l'avenir.
Mercedes travaille également sur l'intelligence artificielle prédictive, et vient empiéter sur les plate-bandes de Google. Dans un avenir proche, explique Niestroj, vous rentrerez dans votre voiture le matin et la voiture saura que vous allez au travail. Elle vous affichera un itinéraire et vous proposera de vous mettre en relation avec votre assistant (Vous conduisez une Mercedes, après tout!).
Son laboratoire de R & D en Californie compte environ 240 employés et seulement une poignée d'entre-eux travaille sur le "Machine-Learning". Google, Uber, Tesla et probablement Apple ont beaucoup plus de chercheurs et de ressources probables allouées à ce sujet. La capitalisation boursière globale de Daimler tourne autour 85 milliards $ - à peine plus grande que le chiffre d'affaires de Google, et même pas la moitié de celui d'Apple (183 milliards de dollars, en 2014). Mercedes se place donc clairement en challenger du point de vue des ressources financières.
En Septembre, la société a cependant enregistré cinq prototypes de véhicules autonomes à l'autorité compétente en Californie. Contrairement à Google et Tesla, ces voitures autonomes Mercedes ne partagent pas de données visuelles entre elles. "La technologie n'est pas encore là, selon Axel Gern, qui dirige la partie conduite autonome de Mercedes en Amérique du Nord.
Mais Mercedes s'est renforcé avec l'acquisition de Here. Avec ces cartes à disposition, les voitures autonomes de Mercedes ont une vision plus claire des réalités physiques de la route, dit Gern.
Surtout, ce système de cartographie lui permettra d'asseoir son indépendance auprès de Google, qui essaiera de se rendre indispensable aux yeux des constructeurs.
Enfin, tous les constructeurs automobiles avec un projet de voiture autonome travaillent sur le moment délicat qu'est le passage du mode autonome au mode manuel. Dans les années à venir, les conducteurs vont être de moins en moins sollicités, mais ils devront malgré tout reprendre le contrôle du véhicule à un certain moment. Ce qui implique donc qu'ils garderont une part de responsabilité. Google a déclaré à ce propos que ce moment, lorsque le conducteur doit prendre le relai, était parmi les plus dangereux et que seule la solution d'une autonomie totale représentait une alternative sûre.
Mercedes diffère. "Je ne suis complètement d'accord avec ce que Google nous dit ici" explique Axel Gern. "Nous avons beaucoup d'expérience là-bas. Cela a à voir avec les interactions humain-ordinateur".
"Je pense qu'il y a une solution à ce problème", a t-il ajouté.